De nouvelles manières de s’évader,
Exposition au Maif social club, Paris, 3 rue de Turenne. 3-me arrondissement, jusqu’au 23 juillet 2022, courez-y!
Lors de mes déambulations parisiennes, j’ai découvert un lieu par hasard, alors que je me promenais près de la place des Vosges, dans le Marais à la recherche d’un endroit où me reposer. Par ailleurs, je suis sociétaire de la Maif, l’assurance mutualiste bien connue, et je vois passer régulièrement des articles sur la programmation fabuleuse de leur tiers-lieu. Très alléchante et je regrette alors d’être à Bordeaux. Or, ne voilà-t-il pas que je tombe nez à nez avec ce lieu qui me faisait de l’œil! C’est un signe : entrons.
Je prends le petit passage rafraichissant pour entrer dans le lieu, un jeune homme m’accueille et m’explique le fonctionnement du lieu .
Peut-être ne savez-vous pas ce qu’est un tiers-lieu?
J’ai trouvé plusieurs définitions : celle, très officielle du très pompeux ministère des cohésions territoriales et des relations avec les collectivités territoriales :
« Pour pallier l’isolement et dynamiser leur territoire, des citoyens créent depuis des années des tiers lieux afin de développer le «faire ensemble » et retisser des liens. Ces lieux sont des acteurs centraux de la vie de leurs territoires. Leurs activités, bien plus larges que le coworking, contribuent au développement économique et à l’activation des ressources locales. » Elle a l’avantage de coller aussi aux situations rurales.
Une autre très générale de la Coopérative tiers-lieux
« Les tiers-lieux sont des espaces où le travail se mélange à d’autres aspects de la vie en collectif. »
J’ai découvert ici une définition et surtout l’origine de ce terme :
A l’origine la notion de « tiers-lieu » a été construite par le sociologue américain Ray Oldenburg, dans un ouvrage paru en 1989, « The Great, Good Place » pour définir des lieux hybrides en ville : « Des lieux qui ne relèvent ni du domicile, ni du travail. Des lieux hybrides qui se situent entre l’espace public et l’espace privé, contribuant ainsi au développement économique et à l’activation des ressources locales ».
Mais finalement, celle que je préfère est celle de Wikipedia, qui correspond bien à celle installée juste à côté de chez moi, la ZAP, dont je vous parlerai un jour dans un prochain article sur les lieux inspirants près de chez moi.
« Les tiers-lieux désignent des espaces dans lesquels s’incarne la volonté d’une communauté de citoyens d’aller vers un monde meilleur. »
Le Maif Social Club, tiers-lieu
C’est un lieu de co-working avec une boutique liée au développement durable, un petit lieu de petite restauration, des ateliers adultes et enfants, une salle d’exposition et des salles de réunion et de conférences à louer à l’étage. Et tout ce petit monde se mêle joyeusement.
Voyage, voyage… (ne me remerciez pas pour le refrain qui va vous trotter dans la tête toute la journée…)
Vous le savez peut-être, le voyage est un des moyens pour renouveler sa créativité, et rien n’est plus exaltant que de renouveler son regard en allant « ailleurs », comme dans cet ancien article.
Cette exposition a demandé à une dizaine d’artiste d’imaginer les manières de voyager du futur. Autant vous dire que cette exposition me semblait avoir été créée pour moi!
Définir le voyage est simple et compliqué à la fois. Il faut le distinguer du tourisme, et c’est là que tout se complique. Sortir de chez soi et « aller ailleurs » ne suffit donc pas. Pour moi, le tourisme, c’est une liste de photo à faire. Le voyage, c’est l’opportunité de rencontrer d’autres humains et par conséquent de soi : dans un environnement nouveau, nos qualités, défauts et intérêts se modifient, se mettent au jour. Le voyage est indissociable à mes yeux d’une prise de notes personnelle : visuelle et littéraire. Si je me déplace sans noter mes impressions, je ne voyage pas. Je me déplace…
Alors et demain? Quel voyage? Quels voyages?
Honnêtement, j’ai presque tout aimé dans cette exposition :
- L’Antartica World Passpaort Delivery Bureau (2008) de Lucy et Jorge Orta : c’est un bureau de délivrance du fameux passeport qui engage son récipiendaire à œuvrer en faveur du développement durable au quotidien par des gestes concrets. Il est fabriqué avec des objets et des matériaux de récupération. Le voyage de demain devra être respectueux de nos environnements humains, naturels et sociétaux : éthique!
- J’ai dessiné les « valises paysages » de Kathleen Vance. Si un objet représente le voyage aujourd’hui, c’est bien la valise! Mais qu’en sera-t-il demain, où nous pourrions nous faire fabriquer sur place les vêtements et objets manquants à l’aide d’imprimante 3D? En aurons-nous encore? Et quels souvenirs rapporterons-nous? Par quel biais?
- Le selfie, symbole du voyage aujourd’hui? l’artiste Laila Hida a créé un pop up studio, où chacun peut faire son selfie. Arnakech Projet, 2018; déconstruisant ainsi l’exotique et la vision colonialiste du kitsch
- Emos de Medeirons a conçu des sculptures en forme de casque couvert de cauris qui diffuse une vidéo pour signifier le voyage dans l’espace : les Vodunaut.
- Mounir Ayache interroge notre vision renouvelée du voyage et du tourisme : sera-t-il virtuel? A travers la littérature, le cinéma, la réalité virtuelle, les jeux-vidéo, la science-fiction est-elle encore/aussi un voyage? quelles rencontres cela crée-t-il? Son simulateur de vol nous permet de nous évader vers le temps futur, un avenir chimérique, fantasmé. Commun ou individuel? Et cela m’interroge : quelle place pour la rencontre dans ce voyage?
- et j’ai particulièrement été touchée par la dernière œuvre de l’exposition : une porte qui nous interroge sur ce qui fait la valeur de nos voyages : les rencontres? les paysages? la destination? les détours? Duplexity, Akacorleone
- Mais toutes les autres œuvres : cartes, tour de vigie, sculptures d’objets, paysages-aquarelles m’ont séduite.
- Et pour terminer, une violoncelliste accompagnée d’une médiatrice culturelle, nous a proposé un voyage en musique sur des œuvres musicales choisies pour leur capacité à nous faire voyager en adéquation avec les œuvres visuelles de l’exposition.
Voyager, pour quoi? pourquoi? pour qui? comment? où?
J’ai aimé être interrogée, un peu bousculée dans ma représentation du voyage, certaines de mes valeurs : slow, développement durable, rencontres ont été inspirées, renouvelées dans cette exposition. La définition du voyage que je souhaite s’affine et s’affirme.
Ma vision du voyage se veut plus slow que touristique (voir le blog de l’Atelier Bucolique) : en train, à vélo ou à pied, donc minimaliste et soumise aux aléas et aux rencontres. La rencontre y domine plus que la destination. Chemin faisant, documenter mes aventures, mésaventures, rencontres, paysages, arts populaires me semble le fil rouge du voyage. Le nom de ce blog en est l’image : Les Yeux Grands Ouverts. La sincérité des relations, l’ouverture à la nouveauté et à l’altérité, l’autre est un voyage.