Il était une fois une maman qui devait laisser sa fille de bonne heure à la gare Saint-jean.
Elle partit ensuite jouer les touristes dans la ville.
Son téléphone ayant passé une nuit d’insomnie, elle ne put pas faire de photos de la journée. Journée déconnectée, donc…
Elle prit le tram et le bat3 (la navette fluviale, qui lui permit de dessiner rapidement le pont Chaban) pour se retrouver au port de Lormont (dit bas Lormont, rive droite, donc). Là dans le petit matin à la fois brumeux et lumineux, elle dégota sur sa gauche un escalier qui contournait un enrochement tout neuf destiné à maintenir en place le coteau surplombant la place de l’église endormie. Elle grimpa les rudes marches et s’arrêta sur un premier promontoire, d’où on voyait la Garonne, fil bleu de cette journée et les abords du pont d’Aquitaine.
Un peu plus loin un autre promontoire métallique, vibrant sous les pas des premiers joggeurs, donnait une vue imprenable sur les dessous du tablier du pont (Ah, belle éducation, regarder sous les jupes des filles! Ne me remerciez surtout pas pour la chanson de Souchon qui va vous accompagner toute la journée). Le bruit du train au-dessous, les craquement du pont, l’humidité du bois de lauriers, le froid automnal… Brrrr, il est temps de retrouver le soleil.
Le « Fil vert « , c’est le nom de ce parcours, continue, mais faute d »une carte assez précise en main pour savoir où elle allait atterrir, elle fit demi-tour. Non sans avoir découvert la piscine de Lormont où on peut nager avec vue sur le pont d’Aquitaine enjambant la Garonne, un parc plutôt agréable, entrevu les restes du château du Prince Noir…
En bas de l’escalier, la place s’était animée, et munie d’un magnifique croissant, elle s’installa à la terrasse du café du Printemps, au milieu des conversations footballistiques, des tiercés et des lotos, pour se réchauffer d’un chocolat chaud et annoter ses dessins.
Elle prit un bus pour rejoindre l’autre rive, malgré ses projets de longer les quais de la rive droite (le dimanche, ce bus-là était de repos), saluant au passage le parc de l’Ermitage. L’arrivée au port de Bordeaux valait bien un petit croquis en noir et blanc aux feutres-pinceaux Pitt, faute d’avoir eu le temps de s’arrêter au port autonome ou au parc des Angéliques, voire à Darwin.
Il faisait bien, bien faim. Mais les quais avec leur perspective, leurs badauds, les reflets de la Garonne, c’était trop tentant.
Quasiment un panoramique pour le croissant du port de la Lune, qui comme à Cologne ou à la Nouvelle-Orleans, dessine une courbe majestueuse. Il devrait y avoir une jumelage des villes du croissant… La marée descend, on voit les épaves très nettement, qu’on ne voyait pas ce matin
Un burger atlantique plus tard, reprise de la marche, bien balisée, le long des trop commerciaux hangars jusqu’à la place de la bourse où commençait le rassemblement prévu en l’honneur de Samuel Paty, le professeur d’Histoire-géographie décapité par un fanatique. J’y ai retrouvé d’anciens collègues.
Je me retournai et je contemplai le miroir d’eau, déserté à cette saison… ou presque.
Un peu plus loin près du ponton d’honneur, un navire russe a jeté l’ancre pour une quinzaine de jours. Difficile de l’approcher suffisamment ou au contraire d’être assez loin pour une vue d’ensemble. Je me contenterai d’une vue parcellaire, et de l’entremêlement de ses haubans et me régalerai des exclamations des enfants devant ce « bateau de pirates ».
Je suis prête à partir et je me retourne pour chercher l’arrêt de tram le plus proche… La porte Cailhau est là, qui me tend ses bras…
La nuit tombe bientôt, mes pas sont lourds, il est temps de rentrer. Seule, Madame Cendrillon m’accueille.